Depuis la parution du livre de Camille Kouchner, « La familia grande » en janvier 2021, plusieurs révélations font état des faits incestueux en France. Des langues se délient. Des langues muettes depuis des décennies par peur ou par honte, ou simplement murées dans le silence du cercle familial. Des souvenirs enfouis dans un passé douloureux refont surface dans la mémoire des victimes. Comme une rage ultime de vaincre le mal infligé à ceux qui devraient être protégés et aimés dans le foyer familial, ce livre est un véritable cri d’alarme qui dénonce l’inceste de toute une société en mal de repères.
Qu’est-ce que c’est l’inceste ? Le dictionnaire le définit comme toutes relations sexuelles entre un homme et une femme liés par un degré de parentés entraînant la prohibition du mariage, c’est-à-dire des relations sexuelles entre parents très proches. Telles que entre parent et enfant, entre enfants d’une fratrie (y compris « demi-frère et demi-sœur », pardon pour ces termes consacrés usuellement), entre grand-parent et petit enfant, ou encore entre oncle ou tante et neveu ou nièce, voire selon certains entendements entre cousins. L’inceste est défini par une norme sociale fondamentale à la famille mais son application formelle dépend de l’autorité à laquelle on se réfère. Elle peut se référer à la culture, aux coutumes et aux bonnes mœurs ; à la religion ou au droit et à la légalité.
Les faits incestueux sont ignobles et déplorables. Ils sont condamnés par la société. Cependant, ils ne sont pas nouveaux puisque ils sont rapportés dans l’histoire d’Egypte pharaonique tout comme dans un passé récent dans certaines régions du monde où des mariages consanguins des familles royales étaient considérés comme un moyen pour assurer la pérennité du royaume. Au Japon, en 1989 ; l’empereur Akihito est le premier de sa dynastie à être marié à une femme ne faisant pas partie de sa famille.
Les faits incestueux dénoncés en France ont été commis pour la plupart sur des mineurs. La souffrance indicible des victimes repose à la fois sur le poids de l’abus sexuel que sur le lourd fardeau du huis clos familial. Celui-ci sous-entend qu’en dénonçant le secret familial les victimes se rendraient coupables de l’éclatement de leur propre famille. Le livre de Camille Kouchner et son admirable courage renvoie la société face au problème de ce tabou qui fait cohabiter un climat de peur, de honte et de culpabilité auquel bon nombre de victimes sont confrontés.
Des témoignages par centaines abondent sur les réseaux sociaux. Qu’il s’agisse des personnalités très connues (au-dessus de tout soupçon) ou des citoyens anonymes, tous se sont rendus coupables de viol incestueux. À la cour d’assises, on juge aussi bien des pères incestueux, des grands-parents pervers, des tontons pédophiles, des beaux-parents, des frères et des sœurs. En 2009, 26% des français rapportaient connaitre au moins une victime d’inceste dans son entourage. Ce mal qui gangrène la société est plus grand qu’il n’y paraît et mérite de concentrer tous les efforts de lutte chez les politiques, les travailleurs sociaux, les associatifs et les églises chacun dans son rôle respectif.
Quoi faire ? Que faire ? La prescription pour le viol d’un enfant est aujourd’hui de trente ans après sa majorité. Certains pensent qu’il ne devrait pas avoir de prescription vu la gravité des faits. Des juristes pensent que la durée de prescription est un moyen pour pouvoir vérifier les faits car plus loin on repousse la durée moins on a des chances d’avoir des preuves (mémoire faillible) pour dire le droit. Dénoncer ne suffit pas. Il faut combattre le mal dans ses racines. Il faut faire un travail de prévention dans les familles, dans les écoles et en particulier auprès des plus fragiles. Le rôle de la famille est capital. Mieux elle se porte, mieux la société se porte. Une famille fondée sur des valeurs morales est un foyer d’épanouissement. Une famille où règne un climat immoral, sans interdit et sans retenue ouvre la voie à l’inceste. Dans un monde où les limites de la liberté sont toujours repoussées au détriment des mœurs, ou le libertinage est revendiqué haut et fort ; l’inceste devient un fléau destructeur des foyers. L’heure est venue où nous devons mobiliser tous nos efforts contre ce fléau !